Les droits sexuels et reproductifs sont une prérogative dont devrait jouir tout être humain. Cependant, de la théorie à la pratique se situe un fossé que les femmes ne franchissent que difficilement.
La société dans son ensemble limite la jouissance de ces droits aux femmes, même dans les cas où les lois le permettent. Au Bénin, les DSSR sont garanties à tous sans distinction de genre. Mais comment les filles et les jeunes femmes en font-elles usage notamment pour lutter contre les grossesses non désirées ? Dans quelle mesure sont-elles conscientes de leur autonomie corporelle ?
DSSR : une difficulté d’accès à l’information
Pour pouvoir jouir d’un droit, il faut être conscient du fait qu’on le détient. Pourtant, le tabou existant autour de la sexualité rend difficile l’accès à l’information aux filles et jeunes femmes.
Elles ignorent souvent le fonctionnement de leurs corps, et les différentes méthodes existantes pour se protéger sexuellement. Cela s’explique par le manque d’éducation sexuelle et la rétention d’information que font parfois les professeurs dans les lycées.
« Il est important de maîtriser son corps et son cycle, pouvoir calculer ses périodes d’ovulation, de règles afin d’éviter les grossesses non désirées. »
Dans le but de protéger et d’éloigner les jeunes de la débauche, on préfère les priver de ces connaissances importantes pour la construction de leurs vies sexuelles ce qui a un effet contraire que celui escompté :
Au Bénin, une grossesse sur 5 est non désirée et environ 15,99 pour cent des adolescentes sexuellement actives tombent enceintes sans le vouloir.
Les injonctions sociales face à la souveraineté de l’autonomie corporelle
L’autonomie corporelle consiste « à avoir le droit de prendre ses propres décisions pour son corps et son avenir. Il s’agit d’avoir l’autonomie nécessaire pour faire des choix éclairés. Ces valeurs sont universelles ».
Toutefois, la société érige divers types de règles qui tendent à limiter, voire supprimer l’autonomie corporelle des filles et jeunes femmes. Il s’agit en l’occurrence des injonctions concernant leur style vestimentaire, ou encore les soins apportés à leurs corps.
En outre, les corps des filles et des femmes font presque partie de l’espace public. En effet, il n’est pas rare qu’elles subissent des attouchements dans la rue « une tape sur les fesses par ci, une caresse indésirée par-là » sans pouvoir s’y dérober. En conséquence, elles intériorisent et banalisent les agressions qu’elles subissent ce qui peut conduire à des violences plus graves.
« L’autonomie corporelle permet à la femme de se soustraire à des rapports sexuels non consentis, le droit de refuser tout attouchement indésirable ».
La société envoie également un message paradoxal aux filles et jeunes femmes : elles ont l’obligation de s’abstenir de tout rapport sexuel en dehors du mariage, mais doivent satisfaire en tout temps leurs époux dès qu’elles sont mariées. C’est notamment l’une des règles véhiculées par la religion musulmane « Dans la religion musulmane par exemple on nous dit que la femme a le devoir de satisfaire son mari à chaque fois qu’il le désire sous peine d’être maudit par les anges. Cela est une obligation sans quoi on va en enfer. Cela va à l’encontre de l’autonomie corporelle de la femme. »
En définitive, bien que juridiquement elles ont le droit de disposer de leurs corps comme elles l’entendent, elles ont l’obligation sociale de déléguer leur autonomie corporelle à une personne tierce. Cela se matérialise également parfois dans l’obligation de choisir une méthode contraceptive imposée par leur partenaire ou de poursuivre une grossesse non désirée.
DSSR : un outil important dans la lutte contre les grossesses non désirées
Il est important de rendre accessibles les informations relatives au droit à la santé sexuelle et reproductive et sur la contraception aux jeunes femmes afin qu’elles puissent efficacement prendre des décisions pour leurs vies et leurs bien-être.
Le tabou sur la sexualité doit être levé, des explications claires, concises et précises éviteront aux jeunes filles d’aller vers la sexualité pour les mauvaises raisons.
Il serait également important de construire la conscience de soi et l’autonomie corporelle des filles. Elles doivent savoir qu’« on a le droit de faire ou de ne pas faire des choses en rapport à la sexualité ».Pour finir, « Les grossesses non désirées ne sont pas forcément la résultante de rapports sexuels consentis. Elles surviennent parfois de viols. ». Il est donc important de faire comprendre à tout un chacun l’importance du consentement, et le respect de l’autre afin de faire cesser les violences d’ordre sexuelles.