Le samedi 30 Juillet 2022 au BÉNIN, des féministes ont tenu une discussion sûre et sécurisée sur la plateforme de réunion en ligne Zoom ; une séance d’échange qui a marqué le premier Girl Talk de cette année. Cette conversation nous est apparue nécessaire en raison de la difficulté des jeunes béninois, plus précisément les jeunes femmes, d’avoir accès aux contraceptifs et aux informations qui y sont liés.
Quels sont ces stéréotypes, comment impactent – ils les femmes dans leurs quotidiens et en quoi constituent-ils un frein à la justice reproductive ? C’est le thème qui a meublé les échanges lors de ce Girl Talk. L’objectif de cette conversation était d’identifier les stéréotypes liés à la contraception au Bénin, d’étudier leur impact sur la vie des filles/ femmes et enfin de clarifier ensemble avec les participantes les concepts de contraception, de justice reproductive afin élaborer des stratégies pour déconstruire les dits stéréotypes.
Plusieurs stéréotypes empêchent les femmes de jouir sereinement de leur droit à la contraception
La contraception est un sujet tabou au Bénin. Un stigmate social pèse sur les femmes qui voudraient avoir un contrôle sur ce pan si important de leur vie. Bien que la loi béninoise soit favorable au droit des femmes à disposer de leurs corps, l’épée de Damoclès sociale leur laisse peu de marge de manœuvre. Nous avons invité les participantes à se remémorer une situation où elles se seraient senties jugées en voulant se procurer des contraceptifs afin d’en déduire les stéréotypes à la contraception.
Il en est ressorti que dans notre société, une fille ou une femme, non mariée se procurant la pilule par exemple est perçue comme une femme de mœurs légères en raison du tabou de la sexualité féminine.
Les contraceptifs d’urgence sont perçus comme un moyen d’avorter, ce qui ramène encore à l’idée du manque de moralité de la personne qui y a recours. Il est également ressorti que les femmes ont parfois de mauvaises informations par rapport à la contraception.
En général, les participantes ont attribué ces stéréotypes au patriarcat, au sexisme, aux religions et à la tradition.
Les répercussions de ces stéréotypes sur les femmes
Les répercussions de ces stéréotypes sont de deux ordres principaux selon les participantes. Le premier concerne l’estime de soi des femmes. Le jugement constant de la société sur la sexualité des femmes qui osent poser l’acte, parfois publique, de se procurer une méthode de contraception pèse sur leur mental.
Certaines se sentent donc obligées de cacher leur implant ou autre moyen de contraception afin d’éviter les jugements de la société qui peuvent être épuisants à la longue.
La seconde répercussion est d’ordre sanitaire. La difficulté d’accès à l’information juste sur la contraception ainsi que le jugement de certains agents de santé obligent les filles et femmes à user du bouche à oreille pour faire leur choix. Cela a des conséquences négatives sur la santé de certaines femmes qui ne font pas nécessairement le choix qui leur conviendrait le mieux.
En outre, ces stéréotypes limitent le droit des femmes à disposer de leur corps et à jouir de leurs droits sexuels et reproductifs de façon sereine.
Se libérer des stéréotypes à la contraception pour une réelle justice reproductive
De cette conversation, il est ressorti que les stéréotypes sur la contraception limitent grandement la jouissance des droits des femmes. Les participantes ont exprimé leur plaisir de pouvoir avoir un espace pour en discuter sans jugement, ce qui est rarement le cas dans la société.
Nous avons donc pensé à quelques stratégies afin de lutter contre ces stéréotypes opprimants.
Les participantes ont évoqué l’importance de la sensibilisation des agents de santé et de pharmacie sur la façon dont ils accueillent les femmes qui viennent à eux pour un moyen de contraception. Un accueil chaleureux et bienveillant permettrait aux femmes d’avoir un accès à la bonne information et ainsi de jouir de leurs droits le plus sainement possible.
La seconde solution serait également de sensibiliser les femmes afin qu’elles comprennent l’importance du gynécologue dans le choix d’une méthode de contraception, notamment dans la limitation des effets secondaires qui pourraient découler d’un choix mal fait.
Les participantes ont ensuite proposé un travail plus profond sur la sororité béninoise. Les femmes étant souvent les jugent des femmes, déconstruire la misogynie intériorisée serait primordial pour se libérer de ce jugement social lié à la sexualité.
Somme toute, cette conversation a été une ouverture indispensable sur ce sujet trop peu abordé dans notre contexte. Toute femme a un droit irréfutable sur sa personne, son corps, sa sexualité. Il faut que nous puissions être souveraines de nous-mêmes et cela passe inévitablement par la possibilité d’opter ou pas pour un mode de contraception. Ce Girl Talk a été un échange intéressant qui démontre de l’envie commune de déconstruire ces stéréotypes contraignants.